BASQUELAND BOHEMIA

By  Manuela Estel

Il y a trois ans au Pays basque naissait Bivouac & Saucisson.

Une bande d’aficionados de la moto dont les road trips, locaux et rustiques, nous rappellent à quoi tient un voyage : à rouler au hasard, le temps d’un week-end. À planter la tente, à manger frugalement, à boire la bière au goulot, bref, à faire simple.

Chaque automne depuis trois ans, une petite dizaine de joyeux lurons enfourchent leur moto et s’offrent deux semaines de road trip. La tente et de quoi grailler dans le sac, ils se laissent porter au gré d’un itinéraire dont ils ont à peine dessiné les grandes lignes. Car après tout, rien ne vaut le plaisir de tirer les toiles de tente entre les motos le soir, décapsuler les bières, trancher le saucisson, et tracer sur la carte, à la lueur de la lampe frontale, l’aventure qui les attend le lendemain. Loin du m’as-tu-vu des hipsters de la bécane – bien que plusieurs d’entre eux portent une barbe bien taillée –, ils sont là pour faire simple. En témoigne le sobriquet de la bande : Bivouac & Saucisson. Tout est dit.

L’amitié, les campements improvisés, le désir d’aventure… Face à ce joli tableau, difficile de ne pas penser à Nous rêvions juste de liberté, le roman d’Hervé Lœvenbruck. Trois jeunes écorchés de Providence, Rhode Island, quittent leur quotidien morose pour sillonner les routes de l’Amérique à moto. « C’est mon livre préféré ! », admet Loïc Chetout, fondateur de Bivouac & Saucisson. Ce n’est donc pas un hasard, même s’il souligne quelques différences : sa bande à lui est née au Pays basque, ne commet ni crime ni délit et ne mène pas une vie de motards nomades à plein temps. En revanche, elle partage la même conviction : inutile d’embarquer dans un avion pour en prendre plein la vue et se sentir libre. Une moto et un début de route suffisent. Surtout quand on vit ici, entre mer et montagne.

Leur premier voyage a commencé à leur porte, sur la Transpyrénéenne, entre le Jaizkibel et le pic du Canigou. « À moto, tu as un sentiment de liberté que tu n’as pas en voiture. Tu te cailles, tu sens le vent, tu vis plein de péripéties, tu tombes en panne… Mais quand tu arrives dans un village en pleine montagne, tout crado, la moto chargée de valises, les gens t’accueillent différemment. » Une « galère-plaisir », comme la nomme Loïc. Depuis, ils ont poussé l’aventure jusqu’aux cols corses, puis l’Italie des grands lacs. À l’automne prochain, leurs moteurs vont vibrer sur l’asphalte du nord du Portugal.

On a envie de faire comme eux. Mais pas la peine d’espérer intégrer leur équipe : les places sont limitées. Le roman de Lœvenbruck et sa fin dramatique y sont à nouveau pour quelque chose : « C’est un roman, mais c’est du vécu : dès qu’il y a du business il n’y a plus vraiment de copains. Ces road trips, on les fait entre nous. On ne veut pas que ça aille trop loin. » Cela dit, rien ne nous empêche d’enfourcher une mobylette, de partir au hasard sur la route qui longe la mer cantabrique jusqu’à Mundaka, et de tomber en panne quelque part sur le chemin. Même le temps d’un week-end, ce sera déjà un voyage, un vrai.

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